dimanche 2 février 2014

le narcissisme et ses pathologies

Heinz Kohut est un auteur qui a focalisé son étude sur le narcissisme, amenant à ce propos de précieux apports. Il en est venu à reconsidérer le narcissisme dans sa définition, et à le concevoir comme une ligne de développement et d’investissement parallèle à celle de la relation d’objet, et non comme un stade du développement de ladite relation d’objet. J’aborde dans ces notes très succinctes quelques unes de ses considérations importantes : le narcissisme, le transfert narcissique, la pathologie narcissique et le traitement des aspects de pathologie narcissique.

A noter que Kohut s’inscrit dans le courant de Fairbairn, tous deux rompant avec la psychanalyse freudienne en considérant que la pulsion est en quête d’objet et non de plaisir.


Le Self :
(dans la lignée de la conception de Hartmann)
Ensemble des représentations de soi contenues dans le Moi. Contenu de l’appareil psychique, plus proche de l’expérience que ne l’est l’Ego.

Narcissisme :
Investissement des représentations de soi (et non pas investissement du Moi).
Le narcissisme est une relation d’objet, distincte de l’amour d’objet. C’est l’investissement d’un objet au statut particulier, appelé selfobjet, à savoir un objet au service du self.
Le narcissisme prend deux configurations (plus tard, Kohut dira deux composantes) :
1.     Le Self grandiose
2.     L’Imago parentale idéalisée

Genèse du narcissisme :
Elle est vue dans l’attitude peu réceptive de la mère. Mère soit aux réponses inappropriées, soit s’appropriant l’enfant pour ses besoins narcissiques à elle

Angoisse du narcissique :
Peur d’intrusion, de perte de soi, de perdre le contact avec la réalité. C’est donc une angoisse spécifique, distincte de l’angoisse névrotique et de l’angoisse psychotique.

Transfert narcissique :
Kohut découvre que le narcissique opère bel et bien un transfert, et donc est un candidat à l’analyse psychanalytique. Mais ce transfert est spécifique par son mode et par son statut.
Ce transfert narcissique a deux formes possibles :
1.     Le transfert idéalisant (« Tu es parfait, et je fais partie de toi »)
2.     Le transfert en miroir (« Je suis parfait et j’ai besoin que tu le confirmes »).
Il existe trois formes du transfert en miroir :
·       Transfert fusionnel
·       Transfert en alter ego
·       Transfert en miroir proprement dit
Le transfert narcissique a un statut différent du transfert d’objet :
·        Le transfert objectal est une résistance, alors que le transfert narcissique est l’objet d’une résistance. Autrement dit, le névrosé se défend par le transfert objectal, alors que le narcissique se défend du transfertnarcissique.
·        Le transfert objectal est un déplacement sur le thérapeute de la relation aux parents. Le transfert narcissique n’est pas un déplacement, mais l’instauration d’un lien narcissique. On pourrait dire, selonmoi, que c’est le déplacement d’une fonction (si l’on ouvre sort de la définition rigoureuse du déplacement de la psychanalyse)

Diagnostic de la personnalité narcissique :
1 Manque d’entrain, malaise, vulnérabilité narcissique, symptômes diffus.
2 Eventuellement rage, hypocondrie, passages à l’acte, dépression.
3 Au niveau relationnel, relations floues, exemptes d’humour et d’empathie. Sensibilité au manque d’égard. Position d’arrogance et d’exhibitionnisme, alternant avec une position de froideur, embarras, honte, et sentiment d’infériorité.
4 Défense possible : cynisme
5 Le narcissique peut user de structures défensives suivantes : Acting, addictions, perversions agies, ou fantasmes de perversion. Leur fonction est de restaurer l’estime de soi, d’éviter la fragmentation.

Les contre-transferts fréquents chez les thérapeutes :
Se sentir investi comme une « fonction impersonnelle » et non comme un objet.
L’inhibition de l’empathie est un risque pour le thérapeute (au service de l’évitement de la fusion).
Le transfert idéalisant amène parfois des défenses contre l’investissement grandiose de soi par le thérapeute.
Le transfert en miroir amène souvent l’ennui, les tensions, l’impatience.

Interventions thérapeutiques avec la personnalité narcissique :
L’empathie est un composant thérapeutique essentiel pour le narcissisme.
Sur le mode des besoins de base successifs que sont rassurer puis nourrir, le besoin du narcissisme est une thérapie où se succèdent en deux phases distinctes : comprendre et expliquer. La compréhension empathique y joue un rôle essentiel (empathie définie comme un effort pour saisir le monde de l’autre, non pas comme on le perçoit mais comme il est vraiment).
Le narcissique a besoin d’une réponse en miroir, c’est-à-dire ni de silence, ni d’interprétation, ni de confrontation à la réalité. Il a besoin de verbalisation et de reconnaissance de ses besoins.
Il est important de laisser le transfert narcissique se déployer (tout comme on le fait en psychanalyse avec le transfert névrotique).
La trame générale de la thérapie se fait en deux temps. Une première étape – qui peut durer plusieurs années – consiste à travailler sur le vécu ici et maintenant, pour consolider l’investissement en selfobjet, et construire chez le client la conscience de la blessure narcissique. Ensuite seulement, la thérapie peut inclure l’interprétation génétique (i.e. interprétation sur le passé).
Face aux structures défensives, la démarche thérapeutique implique d’identifier le déclencheur de la blessure narcissique.
Intervention sur le transfert narcissique : De par sa différence de nature et de fonction avec le transfert objectal, le transfert narcissique a à être soutenu, et ne doit pas être interprété (dans un premier temps) puisqu’il n’est pas une résistance, ni un déplacement. L’interpréter serait non seulement erroné, mais consisterait également en une répétition du traumatisme (de la mère qui refuse l’empathie et détourne ce qu’adresse l’enfant).

http://tricycle.centerblog.net/27-le-narcissisme-et-ses-pathologies-selon-kohut